Les collections tropicales du Muséum

Fondé en 1626, le Jardin du Roi devenu Muséum en 1793, n’a toutefois développé systématiquement ses collections végétales tropicales vivantes, que depuis le milieu du siècle dernier. Celles-là groupent aujourd’hui quelques 7000 taxons et forment une réserve génétique essentielle, avec vocation de conservatoire pour les espèces menacées. Naguère implantée sur le site parisien du Muséum, la plus large part des collections tropicales fit l’objet d’un transfert en 1986 sur le domaine de l’arboretum de Chèvreloup à proximité de Versailles. Cette opération avait été rendue nécessaire par l’insuffisance de superficie des serres parisiennes.

Serre de Nouvelle-Calédonie © Manuel Cohen

Les collections sont abritées sous diverses structures de qualité variable : une longue galerie non équipée pour manœuvrer les sujets d’importance, onze serres basses peu appropriées au développement des végétaux arbustifs, et près de 600 m2 de châssis difficiles à travailler.

Le personnel composé de 6 jardiniers préposés aux tâches immenses de gestion quotidienne des serres tropicales de Chèvreloup, a donc un gros travail à assumer et doit être félicité de tenir ce patrimoine végétal en bonne santé. Il s’agit de collections vivantes dites de référence, bénéficiant pour un certain nombre d’entre elles, du label de collection nationale ou de collection agréée par le C.C.V.S.

Ainsi parmi les succulentes :

  • aeonium = 37 taxons
  • kalanchoé = 115 taxons
  • aizoacée = 325
  • sanseveria = 60
  • aloé = 186
  • mammilaria = 261
  • gasteria = 68
  • rhipsalis = 59  (cactées épiphytes)
  • haworthia = 179

Dans les serres proches on remarque des ensembles de bombacacées, de bégoniacées insulaires, et une importante collection d’euphorbiacées : 170 taxons. Au sein de la famille des apocynacées, si parfumées, on peut admirer l’inflorescence des Acokanthera venenata et Tabernaemontana longiflora, et les belles fleurs en hélice de Ochrosia elliptica et de 1’arbustive Cabucala angustifolia. Le Muséum possède également une collection de commelinacées, où l’on remarque entre autres un énorme pied de Cochliostema odoratissimum à la floraison presque permanente, et un spécimen de Palisota barteri produisant une voluptueuse grappe de fruits. Une magnifique serre paysagère de broméliacées a été aménagée avec les moyens du bord par le botaniste en charge de ce programme : environ 600 taxons, en provenance principale des Antilles.

Dans la longue galerie sont groupés −en rangs serrés− des spécimens très âgés (150 ans pour les aînés) de palmiers : 165 taxons ; de cycadales : 42 taxons notamment du genre Encephalartos E.latifrons, E.lebomboensis, E.lehmannii, ou encore Zamia furfuracea et Ceratozamia mexicana. La collection des araucarias : 16 taxons (la famille est presque complète) a pu être ramenée sur Paris.

Notons également la présence dans cette galerie d’un exemplaire de Pandanus sanderi dont la taille est comparable à celle des grands palmiers, et de Kigelia africana dit encore arbre à saucisses du fait de la forme de ses fruits qui pendent à l’extrémité de pédoncules de plus d’un mètre de long. Dans une serre réservée aux espèces de moindre développement, on peut observer Anchomanes difformis qui ne produit qu’une seule mais énorme feuille, puis de beaux spécimens de Neodypsis decaryi et de Phoenix sylvestis, de Verschaffeltia splendida sorte de palmier-bambou en provenance des Seychelles et de Chambeyronia macrocarpa, espèce de Nouvelle Calédonie dont la palme est de couleur rouge vif à la naissance. La collection des palmiers de l’océan indien que possède le Muséum est d’ailleurs presque complète. Enfin dans une serre dite de plantes utiles conservées entre autres pour leurs propriétés culinaires ou pharmaceutiques, on trouve des collections de thés, de cafés, de ficus (68 taxons) et de pandanacées. Parmi quelques autres plantes curieuses de cet espace, relevons les « arbres à orchidées » Monodora tenuifolia et M.myristica, arbustes dont les fleurs (odorantes) ressemblent à celles de certaines orchidées , et des capillaires géants aux superbes rameaux noirs, Adiantum peruvianum.

Signalons enfin parmi les végétaux grimpants, Antigonon leptopus ou liane corail, très florifère, et Passiflora racemosa fleurissant en grappes. Ne pouvant pas, vu la diversité mondiale des plantes, réunir l’universalité des sujets végétaux concernés, l’unité des serres tropicales du Muséum a fréquemment opté pour des collections spécialisées au sein d’un genre voire d’une famille, mais visant à l’exhaustivité pour les espèces. Une place particulière doit être enfin aménagée aux plantes originaires de Madagascar, espace insulaire depuis 65 millions d’armées où faune et flore ont évolué indépendamment du continent africain : 80 % des espèces y sont endémiques, c’est à dire propres au pays. Parmi une foule de sujets d’intérêt, mentionnons dans les collections du Muséum des cucurbitacées succulentes Xerosicyios decaryi et X. danguyi, et Zygosicyos tripartitus; une légumineuse à la belle écorce rouge cordyla madagascariensis; des collections de pachypodiums et d’euphorbiacées ; de didiereacées, famille de plantes propre à Madagascar; et de kalanchoés capables de se reproduire par viviparité.

Norbert PARGUEL

(Publication originale : Bulletin de la Société des gens de jardin, Antibes, n° 35-1998)

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