Palmier de Chine

Photo 1 _Dana L. Brown
Trachycarpus fortunei, sujet adulte. © Dana L. Brown

Nom latin : Trachycapus fortunei (Hook.) H.Wendl., 1861

Famille botanique : Arecaceae.

Utilisations :

– Ornementale

– Économique : son stipe (tige robuste du palmier), une fois débarrassé de ses fibres, peut être employé comme matériau de construction. Au Japon, ses fibres sont utilisées pour fabriquer des brosses, des vêtements ou des chapeaux, des cordages ou des nattes. En Chine, les palmes entrent dans la composition de tapis.

– Alimentaire/Médicinal : bien que peu goûteuses, ses baies charnues sont parfois utilisées en Asie dans la confection de remèdes, et possèderaient des vertus anticancéreuses.

 

DESCRIPTION

Origine : Le palmier de Chine ou palmier chanvre, principalement originaire du sud de la Chine, possède une aire de répartition naturelle qui s’étend jusqu’au nord de la Birmanie. Il appartient au genre Trachycarpus, qui compte moins d’une dizaine d’espèces, toutes originaires d’Asie et de climats frais. Son importation en Europe remonte au XIXe siècle : le Jardin des Plantes de Paris en fait mention dans ses collections nouvelles dès 1832, tandis que plusieurs écrits citent le naturaliste allemand Philip  Franz Balthasar von Siebold (1796-1866) comme l’un des premiers importateurs de graines au cours de cette même décennie. Naturalisé en Corée et au Japon, ce palmier l’est aussi sur les Îles Chusan (est de la Chine) : c’est de là que le botaniste anglais Robert Fortune (1812-1880) en rapportera à son tour des graines dans les années 1850. Portant alors à l’époque le nom de Chamaerops excelsa, c’est grâce à cette expédition que le palmier de Chine fut définitivement baptisé Trachycarpus fortunei : du grec trachys « âpre, amer », et karpos « fruit », en référence à la saveur de ses fruits, tandis que son nom d’espèce rend hommage à R. Fortune. Par ailleurs, cette expédition lui a également valu le surnom de « palmier de Chusan ». Capable de pousser jusqu’à 2400 m d’altitude, il s’agit de l’un des palmiers les plus résistants au froid, pouvant survivre à des températures de l’ordre de -18° à -15°C. Il est aujourd’hui l’un des palmiers les plus vendus en pépinières et jardineries en France.

 

Principales caractéristiques :

– Morphologie : Trachycarpus fortunei a la particularité de posséder un stipe très fibreux, qui le rend immédiatement reconnaissable et lui permet de résister aux froids hivernaux de son milieu d’origine. De couleur brune, ces fibres entourent les pétioles dépourvus d’épines, mais très coupants, des palmes. Ceux-ci peuvent mesurer entre 50-100 cm de long et sont couverts d’un duvet clair (tomentum) à leur base. Le palmier de Chine possède des feuilles palmées (en forme d’éventail), composées de 30 à 40 segments et sont scindées en deux à leur extrémité. Elles forment une couronne fournie, vert sombre, composée de palmes de plusieurs générations, mesurant entre 60-100 cm de large. Les palmes les plus âgées, à la base, brunissent avec l’âge et se plaquent au stipe, prémunissant le haut de sa couronne contre le froid. Elles finiront par tomber au bout de plusieurs années. Les palmes intermédiaires, ont tendance à se courber horizontalement et à jaunir, tandis que la couronne sommitale, composée de trois à neuf palmes, est dressée vers le ciel.

– Remarque et astuce : l’aspect brunâtre des vieilles palmes peut susciter l’envie de les supprimer, mais il s’agit d’une protection supplémentaire du palmier pour affronter l’hiver : mieux vaut attendre leur chute naturelle, car leur pétiole retient la fibre attachée au stipe (on remarquera que la base de la tige, dépourvue de palmes, prend en vieillissant un aspect plus lisse car les fibres qui les entourent n’ont plus de raison d’être). Si toutefois la tentation de les supprimer est trop forte, il vaut mieux conserver les 4-5 palmes brunes les plus hautes, et effectuer cette opération vers le mois de mai, après les dernières gelées.

– Croissance : le palmier de Chine est un palmier à croissance lente, qui peut mesurer entre 3-4 m de haut en 10 ans, jusqu’à 12 m à maturité pour une largeur d’environ 2 m, en pleine terre. En pot sa croissance sera limitée à environ 1,50 m pour une largeur d’environ 50 cm en une dizaine d’années. Très effilé, il conserve une silhouette élancée au bout de la quatrième année de culture. Lorsqu’il est jeune, ses palmes, très grandes, ont tendance à masquer le stipe, ce qui lui confère une allure originale. 

– Autres particularités : c’est un palmier dioïque, c’est-à-dire qu’il existe des individus mâles, qui portent des inflorescences jaune d’or en grappes, et des individus femelles, chez qui ces grappes sont jaune crème. Les fruits, portés par les individus femelles, sont des baies ovoïdes charnues de couleur noire aux reflets irisés de bleus qui attirent quantités d’oiseaux. Les graines qu’ils contiennent germent très facilement aux pieds des individus adultes.

– Pour ne plus se tromper : en France, plusieurs genres de palmiers sont commercialisés en pépinières et jardineries. Les plus courants, avec le palmier de Chine, sont le dattier des Canaries (Phoenix canariensis), le dattier (Phoenix dactylifera), le palmier nain (Chamaerops humilis) ou encore le palmier de Californie (Washingtonia filifera) et il peut être difficile de s’y retrouver. Voici quelques astuces pour les différencier :

– Le dattier des Canaries (Phoenix canariensis) est originaire des Îles Canaries (Espagne). Il a une couronne très fournie de feuilles pennées et possède un stipe renflé, massif, qui lui donne l’allure d’un ananas au stade juvénile. À maturité, il peut mesurer entre 10-15 m de haut et résiste au froid jusqu’à -8°C.

– Le dattier (Phoenix dactylifera) est originaire du Proche et Moyen-orient. Comme le précédent, sa couronne de feuilles à maturité est très fournie mais au stade juvénile, ses palmes, portant des pinnules en arêtes de poisson, lui donnent l’aspect d’une antenne électrique et sont entourées par des fibres brunes. Il peut former plusieurs stipes et mesurer jusqu’à 25 m de haut et est rustique jusque -10°C.

– Le palmier nain (Chamaerops humilis) est originaire de Méditerranée occidentale. Il peut être confondu avec Trachycarpus fortunei au stade juvénile : il s’en diffère par des pétioles hérissés d’épines, un aspect plus trapu, des palmes vert bleuté-vert argenté, et une couronne plus fournie. Il atteint 8-10 m à maturité et résiste entre -12 et -10°C.

– Le palmier de Californie (Washingtonia filifera) est originaire d’Amérique du Nord. Son stipe, très fibreux, est élargi à sa base et lui confère un aspect pyramidal. Ses palmes en forme d’éventail sont très larges et peuvent mesurer entre 1,50 m et 3 m. À maturité, ce palmier de grand développement peut mesurer jusqu’à 15 m. Il résiste à des températures de l’ordre de -8°C.

 

Période de floraison :  Estivale, de juin à septembre.

Rusticité : (résistance au froid, à la chaleur…)

– Résistance au froid : jusqu’à -18°C (température à considérer en l’absence d’arrosage ou de pluie). Zone de rusticité : 7.

– Résistance à la chaleur : jusqu’à 35°C, peut souffrir de jaunissement au-delà. Sa température de culture idéale se situe entre 15 – 30°C.

Toxicité : 

Pas de toxicité connue.

LM DUMARGNE Fig. 2
Trachycarpus fortunei, en pleine terre, semé en 2013, planté en 2016 : la base du stipe se lisse, les anciennes palmes brunes le protègent, la couronne intermédiaire est horizontale, les feuilles sommitales sont dressées. © Lise-Margot Dumargne, Septembre 2022.

CULTURE

 

Niveau de difficulté :  Facile, si les arrosages ne sont pas dispensés en excès.

 

Type de sol : Idéalement léger, riche, frais, bien drainé. Trachycarpus fortunei s’accommode aussi de sols calcaires, argileux ou sableux, acides, neutres, ou alcalins. L’idéal étant d’apporter un amendement adapté au type de sol en place : si trop argileux, un complément en graviers ou sable de Loire sera le bienvenu, si au contraire trop pauvre, un complément de compost sera idéal.

 

Exposition : Ensoleillée à mi-ombragée. Ombre possible si racines au sec.

Conduite de culture

– Semis : 

  • Matériel et méthode : Récolter les fruits à maturité. Extraire les graines dès la récolte et les débarrasser de l’excédent de pulpe à l’aide d’un chiffon sec pour éviter toute moisissure. Pour optimiser les chances de réussite, on peut faire tremper les graines dans un récipient d’eau légèrement tiède pendant 24h, pour ramollir le tégument. Les graines pourront ensuite être plantées à une profondeur équivalente à deux fois leur taille en volume de terre, en pots d’1,5 L individuels (pour éviter toute concurrence), dans un substrat léger et fin, soit riche (terreau tamisé ou terreau de semis/bouturage) soit neutre (vermiculite, sable de Loire). Si ce dernier choix est privilégié, peu après la levée des graines, il conviendra de les empoter dans un substrat nourricier (terreau de rempotage). 
  • Période : en extérieur, les semis peuvent s’effectuer dès la fin de l’été car les graines germent très facilement, en quelques semaines avec de la patience. En serre, les semis peuvent être effectués aussitôt après la récolte des graines, maintenus à une température de 20 – 25°C. 

Conseils et erreurs à éviter : attention à maintenir une chaleur qui ne soit pas saturée en humidité, et à bien laisser sécher les pots entre chaque arrosage ! Les graines pourriraient dans leur substrat. Il est important d’effectuer ses semis dans une pièce toujours bien ventilée, s’ils sont maintenus en intérieur. S’ils sont effectués en extérieur, prenez garde aux rongeurs et oiseaux qui raffolent des graines : un petit filet (filet à légumes par exemple) disposé au-dessus des pots vous prémunira des larcins.

– Plantation :

  • Matériel et méthodes : en pleine terre, la fosse de plantation devra être au moins équivalente à deux fois la taille de la motte (les racines des palmiers ne s’étendent pas profondément et sont superficielles). Il est important d’amender le sol de façon à ce qu’il soit bien drainé. L’idéal est d’effectuer un mélange 2/3 terre de jardin et 1/3 matériaux drainants (graviers, pouzzolane, sable de Loire), mais le palmier appréciera tout autant un mélange ½ terre de jardin ½ terreau de rempotage. 

En pot, inutile de choisir des contenants trop profonds, en revanche un contenant plus large que haut sera parfaitement adapté. Le mélange idéal est 1/3 de terre de jardin, 1/3 de terreau de rempotage et 1/3 de matériau drainant (billes d’argiles fines). Bien arroser au premier arrosage, et bien laisser sécher avant un arrosage suivant.

  • Période : la plantation doit être effectuée hors périodes de froid et de fortes chaleurs, préférentiellement lorsque les températures nocturnes sont stables au-dessus des 10°C nocturnes, au printemps ou en fin d’été.

Conseil : les racines du palmier de Chine sont superficielles et fragiles, aussi, en décompactant la motte de votre palmier à la transplantation, veillez à ne pas trop les chahuter.

 

Conduite de culture :

– Emplacement : par son aspect effilé, le palmier de Chine peut trôner au centre d’un jardin en majesté, être utilisé en alignement, en pleine terre, pot, ou bac d’orangerie. Certains parcs historiques ou promenades l’utilisent en alignement : un espacement d’au moins 2 m sera requis entre chaque sujet.

– Fertilisation : en pleine terre, aucune fertilisation ne sera nécessaire. En pot ou bac d’orangerie, des fertilisations naturelles peuvent être apportées, comme du purin d’orties, deux fois par an, en début de printemps et début d’automne.

– Besoins en eau : assez modérés. Le palmier de Chine déteste avoir les racines saturées d’humidité, qui le fait pourrir. En pot ou bac, un apport d’eau sera nécessaire environ toutes les 3-4 semaines (conseils à prendre en considérant l’exposition, la température et le type de substrat).

– Taille : aucune taille n’est requise.

Erreurs à éviter : ne surtout pas tailler les palmes de la couronne de l’année en cours, qui affaiblirait la croissance de votre sujet, et ne surtout pas couper la tête du palmier : comme toutes les monocotylédones, sa croissance s’effectue par le bourgeon apical (la tête).

 

Maladies et parasites courants :

Le palmier de Chine est assez résistant, mais peut être menacé par :

– Parasites : acariens, thrips, cochenilles, mais surtout le bombyx du palmier (Paysandisia archon) et le charançon rouge du palmier (Rhynchophorus ferrugineus). 

Le premier, originaire du continent sud-américain (Uruguay et Argentine), s’est propagé dans les mêmes régions depuis 1997. Il signale sa présence par des palmes sèches, portant des perforations ou des découpes anormales causées par les chenilles. Ce papillon n’a qu’une génération par an, mais son cycle de vie complet peut s’étaler sur 2 ans. Les imagos femelles pondent leurs œufs dans les fibres à la base des couronnes de feuilles de la mi-juin à la mi-octobre.

Le second, originaire d’Asie principalement, a gagné la France par le Var en 2006, puis s’est propagé dans le sud-est et résiste à nos hivers de plus en plus cléments : il commence à s’installer dans nos régions plus septentrionales, sur la côte bretonne notamment. Les palmes jaunissent alors anormalement.

– Maladies : peu sensible aux maladies foliaires. Des décolorations des palmes peuvent apparaître en cas de carence. Dans ce cas, un rempotage sera indiqué pour pallier au problème.

Solutions : en cas d’infestation d’acariens ou de thrips, il est important de veiller à la bonne ventilation de la plante, et si nécessaire de tailler les palmes atteintes. Les cochenilles peuvent être retirées manuellement et les palmes lavées à l’aide d’une solution au savon noir puis bien rincées. 

L’infestation au charançon rouge et au bombyx du palmier est plus grave : la plante peut être condamnée en quelques jours. Il est important d’ensacher la plante atteinte et de prévenir les services municipaux concernés pour endiguer toute propagation de ces ravageurs sur le territoire. Des solutions naturelles peuvent être employées, telles que le traitement aux nématodes Steinernema carpocapsae, des organismes microscopiques contenus dans un mélange de poudre argileuse à diluer dans l’eau. Celle-ci agit en préventif et curatif contre le charançon ET le papillon : il faut pulvériser cette solution vers le haut du stipe et la couronne sommitale. Prévoyez 3 pulvérisations espacées de 3 semaines d’intervalle, dans une période idéale située entre mars et novembre. Plusieurs individus peuvent être traités avec une seule boîte.

 

Fiche réalisée pour la SNHF par Lise-Margot Dumargne, responsable adjointe de culture à l’Arboretum de Versailles-Chèvreloup, Museum national d’histoire naturelle de Paris.