Dattier des Canaries

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Phoenix canariensis, détail d’une couronne de palmes, très fournie chez cette espèce. © Lise-Margot Dumargne, Juin 2018.

Nom latin : Phoenix canariensis H. Wildpret (hort. ex Chaubaud, 1882)

Famille botanique : Arecaceae

Utilisations :

– Ornementale

– Économique : son stipe (tige robuste du palmier) est employé comme matériau de construction et ses palmes pour réaliser des toitures.

– Alimentaire : la sève du Phoenix canariensis faite partie des sèves extraites pour produire les « miels de palmiers » : aux Îles Canaries, les dattiers sont incisés à la base de leurs stipes, qui exsudent le fameux sirop, semi-liquide, riche en saccharose. Récolté aux heures fraîches de la journée, celui-ci est ensuite commercialisé sous le nom de « Miel de Palma » en espagnol. Il faut noter que plusieurs « miels de palmiers » sont commercialisés dans le monde : en Amérique du Sud, le sirop est extrait du Jubaea chilensis (palmier du Chili), tandis qu’en Asie et Asie du Sud-Est, ce sont les Cocos nucifera (cocotiers) et Borassus flabellifer (palmiers à sucre) qui sont destinés à cet usage.

 

DESCRIPTION

Origine : Le dattier des Canaries, faux-dattier ou palmier des Canaries, porte également le surnom de « palmier d’Hyères », en référence aux célèbres alignements de palmiers du sud de la France. Originaire et endémique des Îles Canaries, en Espagne, les Phoenix canariensis sont importés en France au milieu du XIXe siècle, durant une époque où le vrai dattier, Phoenix dactylifera, est massivement utilisé en ornementation des parcs et jardins privés de la côte d’Azur. Alors baptisé Phoenix vigieri, il est peu à peu cultivé dans plusieurs jardins d’acclimatation de la région et prisé pour sa vigueur. C’est finalement le botaniste Justin-Benjamin Chabaud (1833-1915), également jardinier en chef du jardin d’acclimatation de Saint Mandrier sur Mer, près de Toulon, qui le renommera définitivement Phoenix canariensis en 1882. Massivement répandu comme plante ornementale, le dattier des Canaries inonde aujourd’hui le marché des jardineries et des pépinières. Malgré tout, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) l’a classé en 2013 sur la Liste rouge des espèces menacées, avec la mention « Préoccupation mineure » (LC), car ses populations sont localement menacées par l’urbanisme et l’introduction d’espèces exogènes.

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Phoenix canariensis haut d’une douzaine de mètres. Les cicatrices foliaires, clairement visibles, ont été laissées sur le stipe, où des niches écologiques se sont créées, favorisant la plantation de végétaux épiphytes (ici des Bromeliaceae et fougères). © Lise-Margot Dumargne, Juin 2018.

Principales caractéristiques :

– Morphologie : cette espèce est l’une des 17 qui composent le genre Phoenix. Comme la majorité des palmiers, le dattier des Canaries est très apprécié pour ses qualités ornementales. Il peut atteindre à maturité entre 10-15 m de haut pour un stipe de 30 à 60 cm de diamètre. Ce dernier présente la particularité de porter des bases foliaires rugueuses et persistantes, qui sont les cicatrices des anciennes palmes tombées avec le temps, lui conférant un aspect très graphique. Ses palmes justement sont pennées (c’est-à-dire qu’elles possèdent des folioles – pinnules – opposées, disposées de part et d’autre de la nervure centrale, telles les pennes d’une plume). Elles peuvent mesurer entre 4 à 6 m de longueur et compter jusqu’à une centaine de pinnules. Le pétiole de chaque palme, pouvant mesurer jusqu’à 1 m de long, est hérissé d’épines. Pouvant compter jusqu’à 150 palmes, la couronne est très fournie et donne au dattier des Canaries une allure massive.

– Erreurs à éviter : lorsqu’il est jeune, Phoenix canariensis présente la particularité de ressembler à un gros ananas, du fait de son stipe renflé marqué des stigmates de ses anciennes palmes. C’est l’une des principales raisons pour laquelle cette espèce est très largement appréciée et commercialisée. Cependant, il ne conserve pas cet aspect toute sa vie : de croissance rapide, son stipe va croître d’environ 50 cm à partir de sa 3e année de culture, il vaut mieux donc éviter de le planter trop près des murs d’une habitation, de clôtures, ou autres éléments urbains.

– Autres particularités : comme d’autres palmiers, Phoenix canariensis est dioïque, c’est-à-dire qu’il existe chez l’espèce des individus mâles et d’autres femelles. Les inflorescences mâles sont plutôt courtes et portent des fleurs jaune pâle, tandis que les panicules des femelles sont chargées de petites fleurs blanc crème. Ce sont les individus femelles qui, s’ils sont pollinisés, porteront les fruits. Il s’agit de baies ovoïdes orangées, comestibles mais peu gouteuses, qui attireront les oiseaux. Chaque baie ne possède qu’une seule graine.

– Astuce : lorsque les palmes tombent naturellement, les cicatrices foliaires laissées sur le stipe sont relativement écartées les unes des autres. Aux Îles Canaries, ces espacements forment de véritables niches écologiques pour quantité d’oiseaux, de mammifères ou d’insectes qui y trouvent refuge : la culture de certaines plantes épiphytes exotiques y est également possible ! Par souci d’esthétisme, les municipalités ont tendance à raboter à outrance les stipes, leur conférant un aspect plus lisse que leur morphologie originelle. Si l’aspect d’une palme brunie vous dérange, il est possible de la tailler, mais l’astuce consiste alors à laisser un bourrelet cicatriciel suffisant pour permettre un aspect naturel, et favoriser l’apparition de ces niches : d’autre part, le stipe sera mieux armé face aux rudesses de certains hivers septentrionaux.

Période de floraison :  Estivale.

Rusticité :

– Résistance au froid : jusqu’à -8°C (température à considérer en l’absence d’arrosage ou de pluie). Zone de rusticité : 8

– Résistance à la chaleur : entre 30°C et 40°C. Sa température idéale de culture se situe entre 15-30°C.

 

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Phoenix canariensis âgé de 5-6 ans : le stipe juvénile conférant l'aspect d'ananas à la plante durant les premières années de sa vie précède la couronne de feuilles. © Lise Margot Dumargne, Mai 2017.

CULTURE

 

Niveau de difficulté :  Facile.

 

Type de sols : Variés, bien drainés, humifères. Tolérant aux sols légèrement calcaires et argileux.

 

Exposition : Ensoleillée à très ensoleillée, à l’abri des vents trop desséchants ou froids (mais tolérants aux fronts de mer avec embruns).

Semis/plantation :

– Semis : 

  • Matériel et méthode : Il convient de récolter les fruits à maturité. Pour soustraire la graine du pourrissement de la chair de son fruit, il vaut mieux l’extraire une fois les fruits récoltés, et les débarrasser de l’excédent de pulpe à l’aide d’un chiffon sec : cela a pour but d’éviter toute moisissure. Pour optimiser les chances de réussite, on peut faire tremper les graines dans un récipient d’eau légèrement tiède (pas brûlante) pendant 24h, pour ramollir le tégument. Les graines pourront ensuite être plantées à une profondeur équivalente à deux fois leur taille en volume de terre, en pots d’1,5 L individuels (pour éviter toute concurrence), dans un substrat léger et fin, soit riche (terreau tamisé ou terreau de semis/bouturage) soit neutre (vermiculite, sable de Loire). Si ce dernier choix est privilégié, peu après la levée des graines, il conviendra de les empoter dans un substrat nourricier (terreau de rempotage).

 

  • Période : en extérieur, les semis devront s’effectuer au printemps, avec le retour des beaux jours. Les graines germent plus rapidement si les semis sont maintenus à une température de 20-25°C, et lèvent en quelques semaines avec de la patience. En serre, les semis peuvent être effectués aussitôt après la récolte des graines, avec les mêmes conditions de culture. 

Conseils et erreurs à éviter : attention à maintenir une chaleur qui ne soit pas saturée en humidité, et à bien laisser sécher les pots entre chaque arrosage ! Sinon les graines risquent de pourrir dans leur substrat. Il est important d’effectuer ses semis dans une pièce toujours bien ventilée, s’ils sont maintenus en intérieur. S’ils sont effectués en extérieur, prenez garde aux rongeurs et oiseaux qui raffolent des graines : un petit filet (filet à légumes par exemple) disposé au-dessus des pots vous prémunira des larcins.

– Plantation :

  • Matériel et méthodes : en pleine terre, la fosse de plantation devra être au moins équivalente à deux fois la taille de la motte (les racines des palmiers ne s’étendent pas profondément et sont superficielles). Il est important d’amender le sol de façon à ce qu’il soit bien drainé en cas de sols trop compacts (billes d’argiles, graviers, pouzzolane, sable de Loire grossier…). L’idéal est d’effectuer un mélange 2/3 terre de jardin et 1/3 matériaux drainants précédemment listés, mais le palmier appréciera tout autant un mélange ½ terre de jardin ½ terreau de rempotage. 

En pot, inutile de choisir des contenants trop profonds, en revanche un contenant plus large que haut sera parfaitement adapté. Le mélange idéal est 1/3 de terre de jardin, 1/3 de terreau de rempotage et 1/3 de matériau drainant (billes d’argiles fines). Bien arroser au premier arrosage, et bien laisser sécher avant un arrosage suivant.

  • Période : la plantation doit être effectuée hors périodes de froid et de fortes chaleurs, préférentiellement lorsque les températures nocturnes sont stables au-dessus des 10°C nocturnes, au printemps ou en fin d’été, avant la baisse des températures nocturnes.

Conseil : pensez à « déchignoner » (décompacter) la motte de votre palmier avant plantation pour éviter aux racines de s’étouffer à la reprise.

Conduite de culture : 

– Emplacement : le dattier des Canaries, par son aspect imposant, se suffit à lui-même dans un jardin ayant la capacité de le contenir. Certains parcs historiques ou promenades l’utilisent en alignement : un espacement d’au moins 2 m sera requis entre chaque sujet.

– Fertilisation : ne requiert pas d’engrais, autre qu’un amendement de terreau riche lors de la plantation ou des rempotages. 

– Besoins en eau : faibles. Le dattier des Canaries déteste les excès d’eau et les situations humides prolongées qui entraînent un pourrissement du système racinaire.

– Taille : possibilité de tailler les palmes si l’aspect brun qu’elles prennent en séchant ne vous convient pas. La taille s’effectuera sur la couronne de l’année passée (brune), de préférence au printemps, afin de permettre au palmier de cicatriser plus vite lors de la montée de sève, et de protéger son stipe des gelées en automne-hiver. Sinon, laissez tomber les palmes naturellement, aucune taille n’est requise.

À éviter : ne surtout pas tailler les palmes de la couronne de l’année en cours, qui affaiblirait la croissance de votre sujet, et ne surtout pas couper la tête du palmier : comme toutes les monocotylédones, sa croissance s’effectue par le bourgeon apical (la tête).

Maladies et parasites courants :

Le dattier des Canaries, assez résistant, peut être menacé par :

– Parasites : acariens, thrips, cochenilles et surtout le charançon rouge du palmier, (Rhynchophorus ferrugineus), coléoptère invasif originaire du Sud-est asiatique, qui cause des ravages considérables depuis son arrivée sur la Côte d’Azur en 2006.

– Maladies : peu sensible aux maladies foliaires. Des décolorations des palmes peuvent apparaître en cas de carence. Dans ce cas, un rempotage sera indiqué pour pallier le problème.

Solutions : en cas d’infestation d’acariens ou de thrips, il est important de veiller à la bonne ventilation de la plante, et si nécessaire de tailler les palmes atteintes. Les cochenilles peuvent être retirées manuellement et les palmes lavées à l’aide d’une solution au savon noir puis bien rincées. L’infestation au charançon rouge du palmier est beaucoup plus grave : la plante peut être condamnée en quelques jours. Il est important d’ensacher la plante atteinte et de prévenir les services municipaux concernés pour endiguer toute propagation de ce coléoptère invasif sur le territoire.

 

Fiche réalisée par Lise-Margot Dumargne, responsable adjointe de culture à l’Arboretum de Versailles-Chèvreloup, Muséum national d’Histoire naturelle de Paris